dimanche 19 juillet 2009

17 juillet 2009 - Interview de Jean-Marie Bockel : «La question des prisons ne se réglera pas en cinq ans »


Jean-Marie Bockel, secrétaire d'Etat à la Justice, confie au figaro.fr qu'il est «dans l'attente d'une jurisprudence » concernant les plaintes de prisonniers pour conditions indignes de détention.

L'Etat a été condamné vendredi par le tribunal administratif de Nantes à payer des indemnités de 5 à 6.000 euros à trois anciens détenus de la maison d'arrêt de Nantes, pour des conditions de détention non conformes aux textes en vigueur. Une décision qui pourrait faire école, tant la situation des prisons est problématique dans notre pays. Jean-Marie Bockel, Secrétaire d'Etat auprès de la Garde des Sceaux, a répondu aux questions du Figaro.fr

L'Etat fera-t-il appel de sa condamnation pour conditions de détentions indignes, suite à une plainte de détenus ?

Je ne peux pas préjuger de ce e nous allons faire, mais je suis conscient que des décisions comparables sont pendantes devant le Conseil d'Etat. Nous sommes dans l'attente d'une jurisprudence. Personne ne nie les problèmes, je visite des prisons chaque semaine. Nous sommes engagés dans un plan ambitieux, 5.000 places de prison supplémentaires étant prévues pour cette année. Les personnels de l'administration pénitentiaire font un travail admirable dans des conditions difficiles.

La situation des prisons en France reste problématique. Que ferez-vous si le Conseil d'Etat donne raison aux prisonniers et que les procès se multiplient ?

Nous avons des efforts considérables à fournir pour que le niveau de dignité de nos établissements soit conforme aux attentes européennes. Nous le savons, nous le faisons, mais on ne peut pas aller plus vite que c'est humainement possible ! Il faudra un temps minimum. On fait le travail, A chaque jour suffit sa peine, j'ai vraiment le sentiment que nous ferons de notre mieux.

L'Observatoire international des prisons estime qu'augmenter le nombre de places dans les établissements ne réglera pas la question de la surpopulation carcérale, qu'en pensez-vous ?

Nous le savons et nous jouons sur plusieurs leviers. Il y a l'humanisation de l'existant, avec l'objectif de faire diminuer le nombre de détenus par cellule. Sans parvenir au système américain, nous avons tout de même besoin de plus de places de prison. Mais il y a aussi les alternatives à l'incarcération, comme le bracelet électronique, de plus en plus souvent proposé. Le gouvernement ne prétend pas que la seule réponse soit celle de la détention. Mais il nous faut des réponses. Nous ne voulons pas, comme d'autres pays, établir des quotas de peines de prison en fonction des places disponibles.

La question des prisons est récurrente en France depuis au moins une dizaine d'années. Pensez-vous être celui qui parviendra à la résoudre ?

Cela ne fait pas dix ans, mais plus de trente ans ! Il faut se rendre compte que depuis la loi de 2002, il y a eu des progrès importants. Je souhaite travailler à d'autres niveaux, comme la question du qualitatif, de la réinsertion. Je suis allé à la Cour européenne, pour marquer le respect de la France par rapport au référentiel exigé par l'Union européenne sur les prisons. On fait le job. Mon souhait, c'est de préserver aussi la qualité de travail des personnels pénitentiaires, de sortir de cette logique qui veut que l'amélioration du sort des prisonniers se traduit par une diminution de celui des gardiens. Je veux aussi trouver un dialogue avacec d'autres acteurs, les familles de détenus, etc. Il faut avancer.

Mais je ne serai pas celui qui pourra régler le problème. Je veux être celui qui fera franchir une étape. Je veux faire en sorte que l'optimisme l'emporte sur le constat actuel. Nous sommes loin du compte. La question ne se réglera pas en deux ans, ni en cinq ans.

Vous êtes en poste depuis presque un mois, quelles sont vos premières impressions ?

Avec Michèle Alliot-Marie, cela se passe très bien. Je travaille sur différents sujets, pas forcément uniquement sur les prisons. Je suis encore dans une phrase d'écoute, de consultations. Je dois travailler en général sur les victimes, les justiciables, les prisonniers. J'aimerais également traiter de la délinquance juvénile, je présenterai des pistes d'ici quelques mois avec le Garde des Sceaux.

Propos recueillis par Samuel Laurent avec Jérôme Bouin (lefigaro.fr)





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